Droit de réponse à ma mère :

Nos réflexions t'amènent à des réflexions qui m'entraînent vers d'autres réflexions...

Moi aussi, je me suis bien évidemment demandée pourquoi faire le tour du monde. Et curieusement, ce n'est pas une question qu'on nous a souvent posée (comment nous allions faire avec les couches, beaucoup plus). J'ai cherché un sens, un but à donner à ce voyage. J'ai voulu lui donner de la hauteur. J'ai parlé de vivre différemment pendant un an, de profiter de la vie, d'organiser un grand projet en famille, de voir le monde d'une autre façon, de changer...

Finalement, au bout de quelques mois, ces considérations se sont d'elles-mêmes effacées. Le voyage est devenu normal, j'ai cessé de chercher un sens honorable (une justification ?) au fait de ne pas travailler pendant un an. Et j'assume ! Franchement, en ce moment, je préfère être sur une plage paradisiaque, me balader dans une ville agréable ou visiter un site exceptionnel que de faire du métro-boulot-dodo. J'ai beau aimé mon travail, ma vie en France et même une certaine forme de routine reposante, il faut le dire : c'est mieux de voir des belles choses et de vivre à son rythme.

Une citation d'Albert Camus correspond bien à l'état d'esprit du moment : Il n'y a pas de honte à préférer le bonheur...

Mais pourquoi être partie plutôt que d'avoir pris un congé parental tranquillement à la maison ? Parce que le quotidien m'aurait rattrapée (c'est une notion facile à alléger pendant un tour du monde...), parce que je voulais "faire" quelque chose de mon temps, "produire" un projet et parce que j'aime voyager (c'est bête comme raison mais c'est pourtant un peu la base du reste). Un autre truc bien agréable quand on n'est pas chez soi et dans un pays étranger, c'est de pouvoir se déconnecter des médias. ça fait vraiment du bien de se libérer de la morosité ambiante de la crise, des licensiements et des drames du jour...

Quant au type de voyageurs que nous sommes, je dois bien l'avouer, nous sommes malheureusement très ordinaires. Comme la plupart des gens qui voyagent longtemps... C'est à dire un peu râleurs, un peu enthousiastes, un peu égoïstes, un peu généreux, parfois riches, parfois pauvres, un peu paresseux, un peu hyperactifs, toujours à la recherche du beau, du mieux, du plus. Les militants, les nomades, les décroissants, les aventuriers, les solitaires ne courrent pas le monde, même s'ils sont, à juste titre, médiatisés.

Dans mes rêves, j'aurais adoré parcourir le monde à pied, sans médicaments, Skype et blog. J'aurais été flattée d'avoir un objectif extraordinaire et de prendre des risques inconsidérés. Mais dans la vraie vie, c'est moins marrant... C'est là aussi que se situe la frontière entre les rêves et les vrais projets.

Et nous avons quand même deux marmots à trimbaler. Nous sommes déjà bien assez des parents indignes comme ça (même si on essaie de faire croire le contraire avec notre stock de médicaments).

Voir le monde de ses propres yeux rend humble aussi (nos rencontres nous prouvent quand même que ça ne marche pas à tous les coups). Les idées sont moins arrêtées, les opinions plus nuancées et on laisse tomber quelques préjugés au passage. Ce blog est assez consensuel. Nous racontons nos découvertes, nos histoires et notre petite vie. C'est probablement ce qu'on attend de nous et c'est ce qui nous amuse.

Nous ne vous exposons pas en large et en travers nos avis sur tout car ce serait quand même présomptueux de livrer une opinion tranchée sur un pays quand on n'y vit que quelques semaines en tant que touristes. Nous voyons les gens et le pays comme derrière une vitrine (expression made in maman), même si on touche beaucoup de choses du doigt. Mais nous sommes à votre disposition pour vous livrer tous nos a priori de vive voix à notre retour !

Nous avons fait un tour du monde "classique". Il nous a ouvert la porte, déjà bien entrebaillée, vers plein d'autres voyages différents de celui-ci... Mais comme dirait Joachim, bientôt ce sera "Plus mon petit Liré que le mont Palatin" et nous serons toujours d'accord à préférer le bonheur !

Sandrine